Q. Qu'est-ce que le ciel profond ? Comment l'observer ?
R. L’astronomie d’amateur, quand elle fait référence à l’observation, peut se décliner de différentes façons : on peut préférer l’observation : du Soleil, des planètes, des étoiles doubles, des étoiles variables, des comètes, des astéroïdes, du ciel profond …
1. Le ciel profond : définition
Qu’est-ce que le ciel profond ? Traditionnellement, on appelle ciel profond l’ensemble de tous les objets n’appartenant pas à notre système solaire. Ici, il s’agit d’une définition un peu plus restrictive : les étoiles doubles ou variables ne seront pas prises en compte non plus, car si elles ne font pas partie de l’environnement immédiat (à l’échelle astronomique) du Soleil, elles font appel à des techniques d’observation bien différentes de celles utilisées pour les objets qui vont nous occuper.
Le ciel profond (c.p.) regroupe des objets appartenant à trois catégories :
– Amas (ouverts ou globulaires),
– Nébuleuses (planétaires, diffuses, à émission, à réflexion, obscures),
– Galaxies (spirales, elliptiques, irrégulières).
2. Quelles difficultés ?
Quelles difficultés l’amateur peut-il rencontrer en ciel profond ?
– A. Quelles précautions spécifiques doit-on prendre pour l’observation en c.p. ?
– B. Quel matériel est le mieux adapté à l’observation du c.p. (optique ou accessoires ) ?
– C. Comment gérer la ténuité des objets à observer ? Les objets de c.p. sont souvent très faibles (mais pas toujours), donc difficiles à repérer et à fortiori à pointer.
– D. L’observation elle-même peut présenter des problèmes. Quel niveau de détails pense-t-on atteindre, comment, etc.
– E. Que « faire » des observations (dessins, notes, etc.) ?
A. La principale précaution à prendre, outre les mesures générales à ne pas oublier est la protection absolue et impérative contre les lumières parasites. En c.p., la moindre source lumineuse, excepté la torche de l’amateur à lumière très faible, va contracter la pupille et nuire ainsi à la détection des objets faibles.
B. Le matériel à employer n’est pas fondamentalement différent de celui que l’astronome amateur utilise en d’autres circonstances. Mais là où le planétaire exige, peut-être, des éphémérides précises et ne demande pas, parfois, de cartes du ciel très détaillées, le c.p., à contrario, a besoin d’une cartographie assez pointue.
On pourra utiliser une carte du ciel en cinq ou six sections, un véritable atlas d’astronomie ou un logiciel (à condition d’avoir un portable pour l’héberger !). Excepté la détection des objets les plus brillants (voir ci-après), un carte « tournante » n’est pas d’un grand secours. Sauf si on débute vraiment et qu’on est un peu perdu face à l’immensité de l’Univers ! A l’opposé, une carte très détaillée n’est pas forcément indispensable, selon le choix d’objets que l’on s’est fixé, lequel dépend aussi de l’optique en usage.
En ce domaine, si on peut admettre que le c.p. commence à l’œil nu avec quelques Messier (M.31, M.42, M.44 , M.45), un minimum est toutefois utile. Mais pas forcément un matos gigantesque et sophistiqué. On peut commencer le c.p. avec une simple paire de jumelles, ou avec une lunette de 60.
Voici, à titre indicatif, les caractéristiques des instruments un peu plus pointus utilisés en c.p. :
– plus grand diamètre possible, afin de récolter, bien sûr, le moindre photon de ces objets quelquefois hyper faibles.
– rapport f/d le plus faible possible, afin d’obtenir un tube assez court (et non pour des raisons de luminosité, comme on le lit parfois).
– système de pointage le plus précis possible (chercheur, cercles manuels et logiciel associé, cercles digitaux, etc.).
– jeu d’oculaires variés, mais souvent avec un grossissement limité (50 x, par exemple). Mais l’observation de certains objets peut demander un grossissement nettement plus élevé,
– filtres de toutes sortes, pour certaines nébuleuses, entre autres.
C. Les objets du c.p. sont fréquemment faibles et ténus. Afin de les trouver quand même, l’amateur va devoir utiliser des astuces simples, mais à connaître. Rendez-vous à la partie 3.
D. Même chose pour les observer (une fois trouvés). Voir partie 3.
E. Observer est une activité de base de l’astronome amateur. Mais observer sans trace laisse vite un sentiment de frustration, et peut entraîner l’arrêt de la pratique. Ce serait dommage, d’autant plus que la photo ou la webcam ne sont nullement obligatoires pour mémoriser ses nuits sous les étoiles. On peut dessiner (voir ……….) ou simplement prendre des notes. Personnellement, je note tout depuis la mi-juillet 1997. J’ai déjà écrit plus de 700 pages, répertorié plus de 4 000 entrées, dont un bon millier d’objets différents. Et je garantis que le plaisir de se relire, quelques jours, mois ou années après, est intact, pour peu qu’on allie technique et humour, essentiel et anecdotes.
J’insiste sur le fait qu’observer sans laisser de traces est un facteur puissant pour dégoûter à tout jamais de l’astronomie d’amateur. Et noter ou dessiner est à la portée de toutes et de tous ! Voyez la partie 4.
3. L’observation elle-même
L’amateur, surtout débutant, aura intérêt à préparer une liste d’objets à observer. Les objets choisis doivent être visibles ( !) et accessibles au matériel employé. On a avantage à classer ces objets selon leur ordre de disparition à l’Ouest (ce sont les premiers à disparaître, donc à voir). De toutes façons, c’est au méridien qu’un objet est le plus intéressant à observer.
Voici quelques conseils utiles sur le terrain :
– Soyez persévérants, mais pas têtu : il faut souvent insister pour dénicher un objet faible, mais savoir stopper quand on sent que c’est trop ardu.
– Prenez le temps d’observer. Combien d’amateurs ne voient pas grand chose sur l’objet qu’ils ont peiné à trouver, ou pire, ne regardent pas et font une photo immédiatement. Pourquoi ?
J’ai vu M.31 une cinquantaine de fois. J’ai dû attendre un moment avant de voir deux bandes d’absorption au Nord-Ouest (vers NGC 205). J’ai aussi noté des inégalités de surface sur M.1. Mais pas la première fois ! (Ce ne sont que des exemples).
– Variez les plaisirs : les astronomes amateurs ne sont pas des scientifiques soumis à un programme de recherche. Si c’est possible, voyez une galaxie, un amas, une nébuleuse, etc. Ou une planète ! Les amateurs de c.p. ne sont pas coincés sur leur « spécialité » …
– Utilisez la vision latérale (ou périphérique). Cette technique consiste à observer un objet en regardant légèrement de côté. Ainsi, on excite les bâtonnets de l’œil situés en périphérie et nettement plus sensibles que les cônes de la vision de jour. Il n’est pas rare qu’une pâle galaxie n’apparaisse qu’en vision périphérique.
– Notez vos observations, ou dessinez.
4. Prendre des notes
Prendre des notes est le moyen le plus simple et le moins onéreux de garder une trace de vos observations. C’est une démarche qui ne nécessite guère de compétences particulières, sinon d’avoir la volonté de le faire régulièrement. Voici quelques recommandations à ce sujet : pensez à noter :
– la date et l’heure (en T.U. ou T.L.) de l’observation. Toujours.
– le lieu. Si vous observez toujours au même endroit, il est peut-être inutile de le préciser systématiquement.
– les conditions d’observations : instrument, temps, bref : conditions matérielles.
– les accessoires spéciaux employés : filtres, par exemple.
– les renseignements sur l’objet observé : nom(s), descriptif (taille, forme, etc.). Cette façon de faire entraîne vite des progrès dans la prise de notes, et, non négligeable, dans la manière d’observer.
Vous pouvez compléter les notes par un petit dessin. On peut définir deux types de dessins :
– le dessin de champ, qui vise à reproduire le champ observé à l’oculaire. Cette méthode permet de confirmer (ou d’infirmer !) la présence de tel ou tel objet, plus tard, avec une carte ou un logiciel de cartographie. Dans ce dessin, ce n’est pas l’objet qui compte, mais ce qui l’entoure. On emploie alors un oculaire à faible ou moyen grossissement (donc, à champ large).
– le dessin de l’objet lui-même.
Un dessin ne vaut que si on a précisé quelques points importants : le champ couvert (l’échelle, en quelque sorte) et la direction (l’orientation) sont un minimum.
Enfin – c’est du moins ma position – vous ne faites pas œuvre scientifique. Agrémentez vos notes de commentaires, d’anecdotes, de détails, sans les noyer sous une avalanche de choses inutiles toutefois ! Relire ses notes longtemps après vous rappellera certainement des souvenirs … de bons souvenirs, même !